Lors de sa production, une carabine se voit attribuée une fiche technique. Les informations les plus accessibles qui y figurent ne répondent cependant pas forcément de manière directe aux questions que l'on peut se poser en tant qu'utilisateur. On pense naturellement qu'une carabine puissante enverra le projectile plus loin. Mais comment savoir, en l'occurrence, jusqu'où un projectile peut être envoyé avec une carabine donnée ? Est-il possible de connaître l'impact sur les performances d'une augmentation de la puissance de votre arme ? Aujourd'hui Toptir vous explique comment comprendre la relation entre la puissance et la portée de votre carabine.

Un peu de balistique

La balistique externe, étudiant la trajectoire d'un projectile en sortie de canon, est une application de principes élémentaires de physique classique. Afin de pouvoir manipuler les outils que cette science fournit, nous vous proposons de voir ou revoir quelques notions préliminaires.

Trajectoire de votre projectile

Sachez que si votre plomb semble filer en ligne droite en sortie de canon, sa trajectoire est en réalité parabolique. Cela signifie que votre projectile tombera vers le sol en décrivant une courbe, avec une pente en général très douce gagnant en altitude d'abord puis redescendant.

Notions et vocabulaire

Lorsque l'on vous dit qu'une carabine peut déployer une puissance de 10 joules, l'affirmation que l'on vous donne est en réalité inexacte. Le joule est une unité de mesure de l'énergie, non de la puissance au sens rigoureusement physique du terme (s'exprimant, elle, en Watt).

Si le fait que l'industrie de l'armement nomme "puissance" une énergie ne pose en général pas de problème, cela peut créer une certaine confusion en balistique. Notons également que la façon d'appréhender les performances d'une carabine à air comprimé diffère grandement de celle utilisée pour une arme à feu. En effet, la "puissance" d'une arme à feu fait référence à la quantité de mouvement imprimable au projectile, dont la masse importe grandement.

La carabine à air comprimé, du fait de la légèreté des projectiles utilisés, emploiera quant à elle un modèle d'évaluation se concentrant sur l'énergie cinétique. Aussi, voici les définitions qui nous seront utiles :

 - Énergie cinétique : mesure l'énergie du mouvement de votre projectile, s'exprime (entre autre) en joules, elle est liée à la masse du projectile et à sa vitesse par une formule (E);

 - Trajectoire : succession dans le temps des positions du projectile en mouvement, elle est calculable par une formule (y);

 - Portée maximale de tir : mesure la distance maximale que peut parcourir votre projectile, étant données des conditions "normales" d'utilisation;

 - Précision : mesure l'exactitude avec laquelle une cible peut être atteinte

 - Conditions initiales : valeurs des variables masse du projectile (m), angle de tir (α), vitesse initiale (v0), hauteur initiale du projectile (y0) et somme des forces s'appliquant au projectile (F).

Afin de simplifier l'étude de la portée, modélisons la situation en l'idéalisant. Étant donné que le monde de la carabine à air comprimé dispose aujourd'hui d'une bonne standardisation, on peut supposer que les plombs utilisés sont en moyenne des diabolos d'une masse (m) moyenne de 0,5 grammes, soit 0,0005 kg. On négligera donc les performances liées aux caractéristiques des types de plomb comme la forme de la tête (une tête pointue sera par exemple plus aérodynamique face à la force de frottement de l'air).

On idéalisera ainsi le modèle du projectile en le ramenant à un "plomb typique". On fera de même avec les conditions initiales en épurant les forces pour ne garder que la gravité (on mettra donc de côté par exemple la résistance de l'air que le projectile traversera et qui créé normalement une force de frottement, la force de rotation de la Terre, etc.).

De ce fait, la somme des forces (F) sera définie comme le produit de l'accélération de la constante de gravitation (g) par la masse (m). Enfin, les conditions "normales" d'utilisation sont des valeurs idéalisées selon le modèle physique des CNTP (Conditions Normales de Température et de Pression) définies pour la balistique par l'ASM (American Standard Metro), correspondant à :

 - Une température de 15°C ;

 - Une humidité de 78% ;

 - Une pression de 999,916 HPa.

La portée maximale d'une carabine (appelée communément "portée" ou "distance de tir") ne se détermine pas indépendamment de la munition utilisée. En d'autres termes : la portée n'est pas une qualité propre à la carabine. Il s'agit en réalité du résultat d'une combinaison carabine-type de projectile-orientation du canon (parallèlement au sol).

Notons au passage que la précision est, de la même façon, le résultat d'une combinaison carabine-type de projectile-tireur. En d'autres termes : la précision d'un tir avec un équipement donné varie d'un utilisateur à l'autre.

Calcul théorique de la vitesse d'un plomb de carabine à plomb

La formule de l'énergie cinétique E est la suivante :

E = 1/2mv²

Ainsi, pour une carabine de 19,9 joules, avec un plomb de 0,0005 kg, on pourra obtenir une vitesse théorique en sortie de canon de 282 m/s, par simple application de la formule. Vous trouverez plus de détails sur le sujet dans notre second article dédié à la portée des carabines à plombs.

Calcul théorique de la portée d'un tir de plomb de carabine à plomb

Pour déterminer la portée maximale théorique d'une carabine, en CNTP, à partir des notions établies précédemment, il nous faut les données suivantes des conditions initiales :

 - La vitesse initiale du plomb en sortie de canon (v0);

 - L'angle de tir (α);

 - L'équation de la trajectoire du projectile.

 - La constante de gravitation (g)

La vitesse ayant été calculée précédemment, (g) est une constante et l'angle de tir est idéalement défini à 45° pour couvrir la plus grande distance possible.

Si une démonstration faisant appel à la seconde loi de Newton, à de la trigonométrie et à des outils d'analyse mathématique (dérivation et intégration) est possible, nous ne fournirons ici par souci de brièveté que l'équation finale (y) :

Les portées réelles : prise en compte des facteurs altérant le tir

Malheureusement, le réel ne peut être exactement prédit et vous noterez des différences dans la pratique. Ce problème est dû à plusieurs facteurs. On peut citer en l'occurrence les plus importants :

 - Les caractéristiques du système de propulsion (ressort traditionnel, CO2, vérin...) et l'état d'usure du mécanisme;

 - La longueur du canon;

 - Le type et le nombre de rayures à l'intérieur du canon;

 - La force de frottement de l'air et la présence éventuelle de vent;

 - l'effet gyroscopique imprimé au projectile en sortie de canon;

 - L'humidité;

 - La température.

Par ailleurs, lorsque le projectile se retrouve en fin de course, son orientation et sa perte d'énergie et de vitesse horizontale le rendent inefficace. Aussi, la notion de portée idéale ne nous est pas d'une grande utilité, quand bien même si elle serait exactement en accord avec la réalité, ce qui n'est pas le cas. Pour ces raisons, on distingue en pratique principalement deux portées de tir :

 - La portée efficace ;

 - La portée utile.

La portée efficace correspond à la distance maximum qu'un projectile peut parcourir après sa sortie de canon avant que sa perte de vitesse ne devienne très grande. La portée utile, quant à elle, représente la distance maximum que ce même projectile peut couvrir avant qu'il perde fortement de son efficacité (notamment son pouvoir de pénétration et sa précision). Dans le langage courant, lorsque l'on veut connaître la portée d'une carabine, on s'intéresse plutôt en générale à sa portée efficace.

Dans la pratique : constats de l'expérience

Dans les faits, lorsqu'il n'y a pas particulièrement de vent, que l'on utilise des diabolos en plomb qui ne sont pas plus lourds ou plus légers que les plus communs, que l'angle et la position de tir sont conventionnels... on peut tirer des acquis de l'expérience. En l'occurrence, la vitesse inscrite sur les fiches techniques après des tests en laboratoire est modérée par les valeurs des tableaux de tir.

Ces tableaux sont réalisés par des professionnels (souvent les armuriers eux-mêmes) après utilisation de la carabine en conditions réelles (non en laboratoire avec CNTP). Ainsi, on peut se baser par convention, grâce aux nombreuses expériences en conditions réelles sur les approximations suivantes :

 - Une puissance de 7,5 joules offrira une portée de 10 m ;

 - Une puissance comprise entre 7,5 et 10 joules offrira une portée de 15 à 18 m ;

 - Une puissance comprise entre 10 et 20 joules offrira une portée jusqu'à 30 m ;

 - Une puissance de plus de 20 joules offrira une portée de 50 m et au-delà.